20110702 "Le pluralisme est mort, vive le pluralisme !"

Nous mettons en lumière aujourd’hui, cet article de Nicolas POSTEL, Maître de Conférences en Economie à l’Université de Lille 1, et chercheur au Centre lillois d’études et de recherches sociologiques et économiques (Clersé), paru en avril 2011, dans "L’Economie politique n° 50"

"Une des caractéristiques de notre société est d’avoir laissé l’économique envahir l’espace public et politique. Et, de fait, les questions économiques dominent très largement l’actualité politique et sociale.

Or, la manière dont ces questions se formulent, les réponses qu’on y apporte, les thèmes qui traversent le débat public sont directement liés à des questions de recherche, des débats théoriques entre économistes. Leurs représentations et leurs préconisations ont, par le passé, transformé très profondément le réel et le transforment aujourd’hui encore. La façon dont on " fabrique " les économistes est pour cette raison une question d’ordre public. Question d’autant plus importante que l’économie va mal, un malaise suscité par la crise qui a démontré aux yeux de tous l’inadéquation des modèles économiques et des préconisations que l’on a pu en tirer. Ce que nous vivons chaque jour prouve qu’il est urgent de s’intéresser à ce qui se passe dans l’univers trop souvent clos des économistes.

Cet univers n’est pas a priori monolithique. L’analyse économique a toujours été traversée par des controverses, souvent fécondes, sur la manière d’appréhender le fait économique. Pourtant, nombreux sont les économistes à considérer que les conditions d’un tel débat ne sont aujourd’hui plus réunies, un seul paradigme étant en situation de se reproduire, le paradigme que l’on qualifie en règle générale de " néo-classique ". Autrement dit : le champ des économistes est en cours de normalisation, d’unification, sur des bases épistémologiques qui sont l’exclusive d’un seul courant… dont la capacité explicative a plutôt fait défaut lors de la crise.

La création récente de l’Association française d’économie politique (Afep), initiative sans doute tardive mais qui a rencontré un fort écho en raison même de l’urgence de la situation, entend précisément bloquer ce processus de normalisation, imposer les conditions du pluralisme chez les économistes, et ainsi préserver les chances d’un débat public qui ne soit pas systématiquement marqué par la pensée unique des économistes. Il en va, pensons-nous, de la bonne santé de notre démocratie : ce n’est pas qu’une question " interne " à la petite communauté des économistes.

Cet article comprend trois temps.

Dans le premier, nous montrons qu’il existe, au moins, deux paradigmes concurrents d’analyse de l’économique : l’un, que nous qualifierons d’institutionnaliste, situe l’économie dans les sciences sociales ; l’autre, que nous qualifierons de formel, considère que les questions économiques relèvent davantage d’une branche de la logique. Il est tout à fait évident que, selon l’un ou l’autre de ces deux paradigmes, les critères d’excellence divergent…

La seconde partie explique, en se penchant sur le mécanisme de production des économistes en France, comment, progressivement, le paradigme formel s’est mis en situation d’étouffer l’autre.

Nous montrons, dans un dernier temps, que, paradoxalement, cette situation de quasi-monopole intellectuel se met en place au moment même où ce paradigme dominant semble entrer dans une phase de rendement décroissant du point de vue de sa capacité explicative.

La diversité paradigmatique des sciences économiques

Nous présentons à grands traits dans cette première partie deux grands..................."

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