20110309 Le Parlement européen prend position contre la spéculation financière : que va faire la France ?

Le Parlement européen vient d’émettre deux signaux forts à destination des gouvernements, de la Commission européenne et des marchés financiers.

Il a voté aujourd’hui 8 mars, à une forte majorité, le rapport de l’eurodéputée socialiste grecque Anni Podimata « sur les financements innovants à l’échelon mondial et à l’échelon européen », qui recommande la mise en place d’une taxe sur les transactions financières. Surtout, il a adopté (à une majorité plus faible mais nette) un amendement au rapport Podimata indiquant que l’Union européenne devrait mettre en place la taxe même de façon unilatérale (sans l’accord d’autres pays comme les USA ou le Japon, qui y sont hostiles). Le Commissaire européen à la fiscalité, Algirdas Semeta, a immédiatement réagi en affirmant que la Commission n’accepterait pas de mettre en danger la compétitivité européenne par une mesure unilatérale.

Hier 7 mars, la commission des affaires économiques du Parlement avait voté, à l’instigation de l’eurodéputé vert français Pascal Canfin, une disposition interdisant une forme banalisée mais particulièrement scandaleuse de spéculation contre les États : la « vente à nu à découvert » de CDS (Credit Default Swaps). Les CDS sont ces titres qui permettent aux investisseurs de s’assurer contre le défaut d’un État sur sa dette. La « vente à nu à découvert » a connu son heure de gloire avec la crise grecque, quand le Premier ministre Papandréou a accusé les spéculateurs d’acheter une assurance sur la maison de leur voisin et d’y mettre le feu pour toucher la prime. C’est en effet ce que faisaient les banques et les fonds spéculatifs, en achetant des CDS grecs alors même qu’ils ne possédaient pas ou peu (achat « à nu ») des titres sous-jacents (des obligations de l’ État grec). Ce faisant, ils faisaient grimper la valeur des CDS, comme si la Grèce s’approchait de la faillite, et provoquaient la flambée des taux d’intérêt sur la dette grecque, du fait de l’inquiétude croissante des investisseurs.

Lors de leur réunion du 14 mars, les ministres des finances doivent se prononcer sur l’interdiction de la spéculation sur les CDS. La position de Christine Lagarde et du gouvernement français sera très attendue. Attac exhorte le gouvernement français à cesser son double jeu systématique, consistant à dénoncer en paroles la spéculation financière tout en refusant en pratique la moindre mesure concrète pour l’entraver. La France doit se prononcer énergiquement et immédiatement pour l’interdiction de la spéculation sur les CDS et pour la mise en place à court terme d’une taxe sur les transactions financières dans l’Union européenne.

Attac France / Paris / le 8 mars 2011.